Nous allons jouer à Qui est-ce ? Savez, ce jeu de
société avec lequel nous nous sommes tous amusés lorsque nous étions gamins.
Une planche avec 24 personnages. Un paquet de cartes. On en choisit une au
hasard. Sur notre propre planche de jeu, on rabaisse l’image du personnage qui
figure sur notre carte. La partie commence : on essaie de deviner quel
personnage a pigé notre adversaire en posant des questions du genre
« Est-ce un homme ? A-t-il les cheveux blonds ? Porte-t-il un
chapeau ? » Ce n’est pas super palpitant comme jeu. Mais quand on est
jeune, on n’est pas trop capricieux, on aime pas mal n’importe quoi, tant que
ça a la propriété de nous divertir 5 minutes.
Même si c’est
moyennement le fun, nous allons jouer, OK ?
Je vais poser les
questions à votre place, vu que le blog, ce n’est pas super interactif,
t’sais.
Alors…
Est-ce une femme ?
Oui. On lui a déjà dit
cependant qu’elle dégageait quelque chose de très masculin. Pas tant dans son
apparence que dans son attitude. Une manière d’être, de faire, une assurance
généralement réservée aux membres du sexe fort. Comme s’il fallait avoir un
pénis entre les deux jambes pour être une personne groundée, confiante.
A-t-elle les cheveux raides ?
Non. Elle a bien
essayé une ou deux fois de se les raidir, mais le résultat n’était pas très
concluant. Deux secondes dehors et hop !, avec l’humidité, ses boucles
revenaient au galop.
Sont-ils blonds ?
Non.
Bruns ?
Non.
Roux ?
Oui. Mais ils
commencent à y avoir des individus blancs au travers. Comme quoi elle aussi
vieillit. Trop vite à son goût.
Porte-t-elle des lunettes ?
Oui. Lorsqu’à 12 ans,
l’optométriste lui a annoncé qu’elle devrait porter des lunettes, elle a pensé
« C’est une catastrophe. » Les gens la traitaient déjà de bolée –
elle avait toujours eu d’excellentes notes à l’école – et elle craignait
qu’on l’associe dorénavant à un rat de bibliothèque, en raison de ses barniques. Aujourd’hui, quand elle ne les
porte pas, elle trouve que sa face a l’air toute nue.
A-t-elle les yeux marron ?
Non. Ils sont
bleus-verts. Le parfait mélange entre les yeux azur de sa mère et ceux vert
pomme de son père. Un regard rieur avec de plus en plus de pattes d’oie autour.
Ça lui apprendra à rigoler trop souvent.
A-t-elle une fossette sur le menton ?
Non. Par contre, le
menton, elle le porte relevé. C’est une personne plutôt fière. Elle n’aime pas
laisser voir ses faiblesses. Elle marche la tête haute, comme si rien ne
l’atteignait, alors que c’est tout à fait faux. Hypersensible, les remarques
désobligeantes et les commentaires d’autrui la touchent beaucoup. Elle fait
juste semblant de ne pas les entendre, puis elle fonce. Une fois rendue chez
elle, elle éclate souvent en sanglots.
A-t-elle les joues rouges ?
Constamment. Elle a un
tempérament sanguin. Elle rougit à rien. De gêne, rarement, d’émotions,
souvent. De joie, de rage, de chagrin. Elle est incapable de cacher ses états
d’âme, ils transparaissent tout de suite sur son visage. Elle admire les gens
qui sont capables de mentir car elle, elle n’y parvient pas. Non pas qu’elle
souhaiterait pouvoir être malhonnête, loin de là, cependant, il y a certains
mensonges qui auraient parfois pu la sortir du pétrin.
Je crois que je sais ! C’est
Mélissa !
Tu brûles. Mais ce
n’est pas tout à fait ça.
C’est Mélissa, oui,
mais seulement une partie d’elle. La Mélissa que tout le monde croit connaître,
celle qui se trimballe en public avec son sourire éternel, sa verve enflammée
et ses grands gestes impulsifs. Toutefois, il existe aussi une autre Mélissa.
Celle-là, on ne la voit pas sur le tableau de jeu.
C’est une jeune femme
angoissée, qui se remet constamment en doute, qui demande juste à être aimée,
qui voudrait qu’on lui caresse les cheveux en lui disant que tout va bien
aller. Elle est tout sauf sûre d’elle-même.
Elle parle souvent
d’elle sur son blogue ces temps-ci. Elle essaie de sortir de sa cachette. De
laisser savoir au monde qu’elle en a marre de se terrer derrière l’autre
Mélissa, l’exubérante, la colorée, l’assurée, la décidée. Elle l’aime bien,
cette autre Mélissa, mais elle est fatiguée que tous croient qu’il n’y a
qu’elle.
Depuis quelques
années, les réseaux sociaux ont grandement contribué à véhiculer l’image d’une
Mélissa inébranlable, alors que ces années ont été particulièrement chargées en
épreuves et en moments difficiles. Parfois, elle aurait voulu que les gens la
prennent dans leurs bras et lui offrent de l’aider plutôt que de lui dire
« Wow, t’es courageuse, bravo, continue comme ça. » Courageuse,
Mélissa, elle ne trouvait pas qu’elle l’était tant que ça. Au bout du rouleau,
c’est plutôt ainsi qu’elle se percevait.
Personne n’a été foutu
de la diagnostiquer, mais aujourd’hui, elle réalise qu’elle a probablement fait
une dépression.
Les gens ne sont
jamais ce qu’on croit qu’ils sont. L’image est traître. Il ne faut jamais se baser
complètement sur elle pour bâtir notre opinion d’une personne et prétendre par
la suite que « cette fille-là, on la connaît bien ».
On ne remporte pas une
partie de Guess Who ? en se
fiant aux premières impressions.
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